Une vengeance maternelle, une revanche d’outre-lycée et une ressortie divine voisinent dans les salles cette semaine. Entre autres…
Sons de Gustav Möller
Danemark, de nos jours. Surveillante pénitentiaire consciencieuse et appréciée, Eva apprend l’imminence du transfert de Mikkel, dans l’établissement où elle exerce. Un jeune détenu qu’elle connaît et à qui elle en veut viscéralement. Afin d’assouvir sa vengeance, elle demande sa mutation dans l’unité où celui-ci est incarcéré, parmi les éléments les plus violents et dangereux de la prison…

Lumière froide, ambiances ternes, teintes désaturées… Sons ne plaisante pas avec les codes du film carcéral ; pas plus qu’il ne cherche à atténuer l’empreinte du drame scandinave, option tragédie. “Crime, châtiments et re-crimes“ pourrait donc résumer l’intrigue de ce film. Cela, même si le titre choisi pour la France (Sons = fils au pluriel) en dévoile trop — en tout cas bien plus que l’original danois (Vogter signifiant “gardienne”, selon les traducteurs automatiques). Au point d’accentuer le parallélisme avec Le Fils (2002) des Dardenne ?
Prends garde !
Dès lors, le spectateur peut se douter des motivations profondes de la surveillante ; il ne fait qu’attendre la confirmation de ses supputations. Leur validation ouvre sur une situation paradoxale : on comprend qu’Eva désire appliquer la loi du talion… et l’on est déçu par le déroulement prévisible des événements — une protagoniste ne se livrant à des actes barbares et/ou sadiques qu’en rétorsion de sévices subis à son endroit (rape and revenge) ou lorsqu’on a touché à sa progéniture. Même les modulations relationnelles (le “transfert”, au sens quasi-psychanalytique du terme, métamorphosant la gardienne de prédatrice en protectrice, voire en proie) semblent suivre une logique un peu paresseuse.
Avouons que la surprise eût été plus grande si Mikkel avait été une victime expiatoire par procuration, par exemple ; le jouet d’une malheureuse ressemblance avec le coupable des faits qu’Eva lui reproche. Certes, cette éventualité semble plus irrationnelle et perverse, mais pas moins absurde compte tenu du fond traumatique d’Eva. Gustav Möller parvient toutefois à creuser un sillon intéressant dans les séquences où il confronte la surveillante et la mère de Mikkel, produisant par les non-dits et l’incongruité de la situation toutes les nuances de malaises possibles chez les personnages comme le public.
Récompensé par le Prix Sang Neuf du jury jeunes de la Région Grand Est lors du Festival Reims Polar, Sons offre surtout à Sidse Babett Knudsen un rôle d’une violence et d’une cruauté inhabituelles, à l’opposé de ses personnages de combattantes héroïque ou de femmes du côté “lumineux” de la loi. Finalement, la monstruosité ne lui va pas si mal…

Sons de Gustav Möller (Dan.-Suè., avec avert. 1h40) avec Sidse Babett Knudsen, Sebastian Bull Sarning, Dar Salim… en salle le 10 juillet
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Moi, Moche et Méchant 4 de Patrick Delage & Chris Renaud
Ancien hyper-méchant converti au camp de bien et à la vie de famille (mais encore grognon), Gru se rend à une réunion d’anciens du Lycée Pas Bon afin de capturer Maxime Le Mal, son rival de toujours qui s’apprête à conquérir le monde grâce à son armée de cafards. Las ! Le plan échoue et Maxime se retrouve dans la nature décidé à se venger de Gru, qui se cache avec les siens sous une fausse identité dans la charmante bourgade de Mayflower…

Passer le cap de la suite, puis de la trilogie, n’a rien d’une sinécure pour les auteurs de ce qu’il faut désormais qualifier de franchise. Soumis à l’exigence de demeurer une fontaine à cash pour les studios mais aussi d’alimenter le fan service en clins d’œil auto-référentiels, leur nouvel opus se doit d’apporter suffisamment de renouveau pour ne pas épuiser la machine. Car même si Moi, Moche et Méchant connaît déjà une série dérivée florissante autour des Minions, la “maison-mère” ne saurait être malmenée. Les exigences étaient donc élevées pour Patrick Delage & Chris Renaud, qui négocient ici les difficultés en souplesse.
Super Minions
Esthétiquement sans reproche — l’animation est désormais parvenue à un tel degré d’excellence et d’uniformité qu’elle ne constitue plus un critère qualitatif différenciant —, le film ne déroge guère aux schémas narratifs traditionnels : Gru affronte sa némésis, se découvre de nouveaux ennemis qui deviennent des alliés supplémentaires pendant que les Minions s’occupent de meubler les arrière-plans ou d’offrir les digressions décalées. Notamment lors d’une séquence révélant les dommages collatéraux que causent les super-héros lors de leurs opérations de sauvetage — ce genre de détail matériel (et franchement réaliste) ne se voit d’habitude que chez Dirty Harry ou dans Austin Powers. Le tacle à destination des concurrents marvelo-dcistes ne manque pas de sel.
À mettre également au crédit de cet épisode, le fait que les gags ne s’éternisent pas sans raison, ou que tout élément à l’écran (décor, personnage…) ne soit pas voué à être strictement utilitaire. Laisser un peu d’air et de gratuité dans le paysage, c’est aussi fort que préserver le rond de serviette de la poésie dans un conseil d’administration.

Moi, Moche et Méchant 4 de Patrick Delage & Chris Renaud (É.-U., 1h34) avec les voix de (v.o./v.f.) Steve Carell/Gad Elmaleh, Kristen Wiig/Audrey Lamy, Will Ferrell/Alex Lutz… en salle le 10 juillet
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Creation of the Gods I de Wuershan
Sortie timidement à l’hiver dernier une période ultra limitée du nouvel an chinois, la superproduction chinoise profite de l’embellie de la fréquentation (merci Artus) pour se lancer à nouveau à l’assaut du grand écran hexagonal. En attendant la seconde partie. Cliquez ci-dessous : la critique figure après celle de Daaaaaalí !